Patriam  Recuperare  et  Albert  Kirchmeyer             

       Il  y  a  Patriam et  Patriam  !

Il y a Patriam et Patriam !

Il ne faut pas confondre le groupe Patriam Recuperare existant de mars 1943 à la Libération avec le mouvement Patriam Recuperare homologué après-guerre à la R.I.F. et qui englobe l'ensemble des groupements depuis 1940 : L.E.F. (Liberté-Egalité-Fraternité), Le Cercle, La Ligue et d'un point de vue strictement maçonnique, l'Atelier de la Bastille et le C.A.M. (Comité d'Action Maçonnique) puis le groupe Patriam Recuperare.

Lorsqu'on dit d'Untel qu'il était à Patriam Recuperare depuis 1940, 1941 ou 1942, c'est qu'il agissait en réalité pour L.E.F. (Liberté-Egalité-Fraternité) ou pour La Ligue. 

Les attestations signées en 1944 par le Colonel Gustave Eychène attestent assez souvent d'une appartenance au groupe tardif Patriam Recuperare. 

Les attestations signées à partir de juin 1945 par Albert Kirchmeyer (revenu alors de déportation) ou par Marcel Cerbu, qui fut le liquidateur du mouvement, précisent fréquemment une appartenance aux premiers groupes et citent des chefs de groupe ou de section.

       Il  y  a  Comité  et  Comité  !

Il y a Comité et Comité !

Le Comité d'Action Maçonique, garant de l'existence de la Franc-Maçonnerie durant l'Occupation, s'est beaucoup modifié entre 1941 et 1944.

A son origine, en janvier 1941, il est composé d'Albert Kirchmeyer, Marc Rucart, Gustave Eychène, Edouard Soubret, Ambroise Peloquin et Louis Bonnard (cités ici dans l'ordre du document ci-contre).

S'ajoutent ensuite d'autres membres mais il est bien difficile de dire qui, à quel moment.

Ce Comité d'Action Maçonnique est un groupe distinct de L.E.F. (Liberté-Egalité-Fraternité), Le Cercle, La Ligue et n'est pas un organe directeur. Il n'y a pas d'organe directeur mais des chefs de groupe, notamment Albert Kirchmeyer, Gustave Eychène et Ambroise Peloquin.

Mais, après la Libération, en octobre 1944, apparaît un "Comité directeur" :

Après les arrestations de mars 1943, le Colonel Eychène et Ambroise Peloquin réorganisent le groupe, nouvellement nommé Patriam Recuperare. Le lien est fait avec le Conseil National de la Résistance créé en mai.

Fin octobre 1944, obligation est faite pour les groupes de Résistance de créer un comité directeur s'ils n'en ont pas, pour rester une organisation reconnue du CNR et pour nommer un membre ayant droit de siéger à l'Assemblée Consultative Provisoire (article 3 de l'ordonnance du 11 octobre 1944).

Le groupe Patriam Recuperare doit donc créer le comité directeur qu'il n'avait pas.

C'est alors que le Comité d'Action Maçonnique devient Comité directeur de Patriam Recuperare. Il se dote d'un président : Louis Lapicque ; de membres : Marc Rucart, Ambroise Peloquin, Edouard Soubret, Henri Lortholary, Georges Zaborowski, Louis Bonnard, Henri Mathieu ; et d'un secrétaire : Gustave Eychène, lequel est approuvé pour siéger à l'Assemblée Consultative.

Mais, dans la foulée, ce Comité directeur/Comité d'Action Maçonnique déclare aussi avoir toujours été le comité de direction de Patriam Recuperare depuis janvier 1941 et rédige en ce sens les premiers historiques du groupe !

Le 20 avril 1945, ce même comité fonde une association Patriam Recuperare avec, pour Président Louis Lapicque, pour secrétaire Louis Bonnard et quatre membres : Ambroise Peloquin, Edouard Soubret, Gustave Eychène et Georges Zaborowski.

Ainsi, après-guerre, le Comité d'Action Maçonnique s'amalgame avec Patriam Recuperare devenant groupe de Résistance, association et loge. 

L.E.F (Liberté-Egalité-Fraternité), Le Cercle, La Ligue, s'ils ne sont pas oubliés, deviennent paradoxalement des sous-groupes internes à Patriam Recuperare et le rôle d'Albert Kirchmeyer s'en trouve en conséquence relativisé.

Si le "Comité directeur" n'a pas oublié de le mentionner mais en tant qu'agent de liaison, en revanche, sa place ne semble pas prévue dans l'association -fondée pour maintenir les liens de solidarité fraternelle entre les résistants- et dont le siège est tout de même noté à sa propre adresse 123 rue Saint-Antoine, adresse que le Colonel Eychène utilisait encore comme bureau !

 


 


Comme il est bien difficile de savoir ce qui, à cette époque confuse et fébrile, relève de l'intention, de l'ignorance, de l'erreur... Il est bien difficile de savoir pourquoi l'histoire en arrive là.


Mais ce qui est certain est qu'Albert Kirchmeyer revient de déportation le 31 mai 1945 et ne peut que constater les choses ainsi devenues pendant ses deux ans et presque trois mois d'absence.

Albert Kirchmeyer essaie semble-t-il de s'inscrire dans ce nouveau paysage en l'acceptant et adopte le nom Patriam Recuperare pour l'ensemble du mouvement, de septembre 1940 à la Libération. Pourtant il aurait bien aimé que Le Cercle, La Ligue soient autrement mieux reconnus (et comme préfiguration du CNR) mais a-t-il le choix ? Le nom Patriam Recuperare est déjà connu, notamment à l'Assemblée Consultative Provisoire où il est invité à siéger, le Colonel Eychène ayant démissionné en sa faveur et contribuant à sa reconnaissance de fondateur et chef du mouvement. 

C'est en cette qualité, à partir de 1948, qu'Albert Kirchmeyer se préoccupera de l'homologation du mouvement à la Résistance Intérieure Française.